Résumé : | L’arthrose, maladie à visages multiples, a été longtemps considérée comme une maladie du cartilage seul, une forme d’usure lente et inexorable d’un tissu qui ne fonctionnerait que comme amortisseur. Les progrès de la recherche à la fois clinique et fondamentale nous ont appris que l’arthrose est d’abord une maladie hétérogène et une maladie d’organe qui ne cible pas seulement le cartilage. On découvrira ainsi, au fil de cette monographie, qu’il existe des différences majeures entre l’arthrose digitale, à l’allure systémique et parfois presque inflammatoire, l’arthrose des articulations portantes du genou et de la hanche, et l’exceptionnelle arthrose de la cheville, secondaire à un déséquilibre d’ordre mécanique. C’est aussi une maladie plurifactorielle avec l’émergence croissante de deux types de facteurs de risque dont les prévalences augmentent dans nos sociétés modernes : d’une part les traumatismes et l’activité sportive, d’autre part l’obésité dont le rôle est prépondérant. Le surpoids, longtemps considéré comme un facteur de surcharge purement mécanique, a un rôle nocif également systémique – par l’intermédiaire de la sécrétion par la graisse du facteur pro-inflammatoire – qu’il faut maintenant prendre en compte. Une des avancées les plus surprenantes de ces dernières années a été la mise en évidence d’une relation complexe entre surcharge pondérale et arthrose par le biais non seulement de facteurs locaux mécaniques mais aussi de facteurs généraux et systémiques comme les adipokines, « cytokines du tissu graisseux ». Pour mieux comprendre ses différences phénotypiques, l’imagerie par résonance magnétique est d’un grand secours ; elle permet aussi de mieux comprendre les mécanismes de la douleur en établissant des corrélations anatomo cliniques. Ces facettes multiples de l’arthrose expliquent la difficulté à la traiter de façon efficace. Les injections intra-articulaires restent une option majeure pour le traitement de la gonarthrose. Quant à la chirurgie, avant de la proposer au patient, il est fondamental de prescrire une kinésithérapie et d’adapter les possibilités médicamenteuses au mieux. Pour autant, elle reste l’élément final de la prise en charge thérapeutique, et impose d’expliquer ce qu’il est possible de faire avec une prothèse, question redondante de nos patients. Progresser dans la prise en charge de la maladie amènera à adapter à l’échelon individuel les thérapeutiques en fonction du phénotype clinique et aussi radiologique de la maladie. La greffe de cellules, soit chondrocytes soit cellules pluripotentes, reste une des possibilités d’avenir. Vous l’aurez compris, la richesse de ces interrogations témoigne du caractère beaucoup plus complexe de l’arthrose que l’image d’Épinal que nous en avions jusqu’à ces dernières années, celle d’une maladie purement mécanique d’usure. Cette monographie de La Revue du Praticien a l’ambition d’éclairer nos connaissances dans ce domaine d’un jour nouveau et sans doute demain novateur. |