Résumé : | Dans sa théorie du désir mimétique, René Girard [1] parle du désir de « faire comme tout le monde » à travers un médiateur interne ou externe. C’est aussi une demande récurrente des patients parétiques. Plus que la demande de marche fonctionnelle, les personnes parétiques cherchent à gommer leur boiterie pour devenir conforme et se fondre dans la masse.
Appliquant cette théorie aux sciences de l’apprentissage, Rizzolatti et Craighero [2] ont montré que l’image mentale d’un mouvement à exécuter se construit par imitation de l’expérimentateur. C’est pourquoi, il nous paraît fondamental de travailler sur le modèle que nous donnons au patient parétique.
Dans un article publié en 2007 [3], nous disions que l’objectif des exercices proposés était d’avoir une référence chiffrée par rapport à une image fantasmée du corps, un standard idéal de jeunesse (le « médiateur externe » de Girard). Ainsi le patient pourrait mesurer ce qui le sépare « maintenant » de ce corps idéal qu’il avait « avant » (« avant » la lésion ou « avant » quand il était jeune ?). Dans le cas des hémiparésies, après des essais infructueux, le patient constate que son ancienne main dominante est inefficace. Il se met alors à manger, à boire, se laver et s’habiller de sa main anciennement assistante qu’il éduque peu à peu. Néanmoins, le kinésithérapeute continue de rééduquer la main déficitaire afin de prévenir des complications.
Hormis le Frenchay Arm Test qui comporte une épreuve bimanuelle (tirer un trait), toutes les autres échelles sont des épreuves d’adresse : Nine Hole Pegs, Box and blocks, Action Research Arm Test (ARA), Motor Activity Log (MAL) qui ne concernent plus cette main. Brunnstrom [4] avait décrit une dizaine de tâches bimanuelles (mettre la ceinture de sécurité, tenir la feuille que l’on découpe, glisser une page dans une enveloppe, etc.).
Le AbilHand [5] décrit 21 items fonctionnels sur 23 où également la main assistante tient l’objet pendant que la main dominante fait la manœuvre. En français, on parle de main dominante ou de main préférentielle pour qualifier la main d’adresse, mais aucun qualificatif ne fait l’unanimité pour décrire la fonction de la main « assistante ». Les anglo-saxons parlent de « Fine motor skills » pour la capacité à contrôler et à coordonner les petits muscles de la main dans des mouvements précis [6]. Ils parlent de « Gross motor skills » pour définir « les capacités motrices brutes ou globales impliquant l'utilisation de grands groupes musculaires qui coordonnent les mouvements corporels pour effectuer des activités telles que maintenir l'équilibre, marcher, s'asseoir, sauter, lancer des objets, etc. Ces habiletés motrices globales ou brutes sont acquises dès la naissance et pendant la petite enfance. » [7].
En 2015 a été publié un essai sur une échelle de graduation des activités bimanuelles après AVC, la BAM [8], mais elle n’est pas encore validée. Ce type d’échelle n’existe que chez les IMC : la BFMF [9], la MACS [10] et l’Assisting Hand Assessment [11]. Mais, là encore, elles se consacrent d’avantage aux habiletés fines et ne précisent pas les qualités spécifiques de la main assistante. Or, une fois que la personne cérébro-lésée chronique est relatéralisée fonctionnellement, on ne peut avoir pour projet de lui faire réacquérir ses fonctions de main dominante. Il vaut mieux éduquer et renforcer les fonctions de main assistante. Ces fonctions de main assistante (décrites par Brunnstrom et Le Abilhand sont essentiellement statiques : elles nécessitent une certaine force d’appui ou de préhension pour immobiliser l’objet, tant que l’autre main effectue la tâche). |