Résumé : | Le champ de la santé, constitué d’une pluralité d’acteurs, d’interactions verbales, d’instruments et d’objets, d’agents pathogènes ou de dispositifs architecturaux est également peuplé de documents et d’écrits, nombreux et variés. Dossiers médicaux, ordonnances médicales, carnets de santé, expertises médicales, manuels qualité, recommandations de bonnes pratiques, protocoles, guides professionnels, rapports, chartes de fonctionnement, règlements intérieurs, littérature médicale ou paramédicale, textes législatifs et réglementaires, réclamations émanant de patients ou de leurs familles, livrets d’accueil, notes de service, ordonnances du juge, articles de presse, etc. Tel est un aperçu des documents – dont différents travaux indiquent qu’ils sont en augmentation au sein des lieux de travail (Rot, Borzeix et Demazière, 2014) et notamment des hôpitaux (Fraenkel, 2001 ; GrosJean et Lacoste, 1998) – qu’est susceptible de rencontrer le chercheur en santé.Pour désigner ce matériau, le terme d’« archives » est fréquemment mobilisé ; il sera préféré ici le terme de « documents » ou d’« écrits » dans la mesure où la notion d’archives ne permet pas d’embrasser la diversité des documents sus-cités. La notion d’archives, par exemple, n’englobe pas ce que l’on appelle les « écrits en situation », i.e. les documents présents, mobilisés, voire agissant, dans les scènes sociales observées tels que les protocoles de soin, les notes de service, les cahiers de liaison ou les dossiers médicaux ou judiciaires n’ayant pas encore fait l’objet d’une procédure d’archivage.L’étude de ces documents et de ces écrits en situation est qualifiée de « méthode documentaire ». Elle constitue le parent pauvre des guides méthodologiques, tout particulièrement dans le cas des recherches en santé, les chercheurs s’appuyant généralement sur un savoir-faire confectionné au fil de leurs expériences et de leurs recherches. Ce chapitre vise à fournir à quiconque souhaiterait mobiliser la méthode documentaire un ensemble de repères : quels sont les différents documents mobilisables et quels phénomènes cette méthode permet-elle d’étudier ? Comment accéder à ces documents et les collecter ? Comment ensuite les exploiter et les analyser ?Afin de répondre à ces questions, je m’appuierai sur mes propres expériences de recherche [1]
[1]Recherche doctorale sur l’expertise psychiatrique dans les…
ainsi que sur l’analyse de travaux repérés ces vingt dernières années dans les revues Sciences sociales et santé et Santé publique ayant mobilisé la méthode documentaire. Bien que je me sois efforcé de mobiliser des travaux d’horizons disciplinaires différents, cette contribution s’appuie principalement sur des travaux réalisés par des sociologues, des politistes, des anthropologues ou des historiens. |