Résumé : | La pandémie de Covid-19 a imposé l’impératif de protection de la santé publique dans le débat européen. Les tensions supportées par certains systèmes de santé en Europe comme le réchauffement climatique ne pourront qu’accentuer à l’avenir cette problématique. Pourtant, les questions de santé constituent l’un des paradoxes de l’Union européenne.
2Les textes fondateurs ont pendant longtemps ignoré la santé publique et affecté l’évolution des systèmes de santé nationaux sous le seul prisme de la libre circulation des professionnels de santé et des produits de santé. Or, dans le même temps, les pays européens présentaient la caractéristique très originale d’avoir bâti des systèmes de santé et de protection maladie particulièrement développés. Depuis la crise de la vache folle et les programmes d’action communautaire dans le domaine de la santé à compter de 2003, les politiques européennes se sont ouvertes aux enjeux de la protection de la santé. L’introduction d’un titre sur la santé publique dans les textes fondamentaux depuis le traité de Maastricht de 1992 et sa consécration dans le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne en 2007 ont précédé puis accompagné cette lente mutation.
3Il reste que l’Europe témoigne toujours d’une extraordinaire diversité d’organisation en matière de santé. On y rencontre des systèmes étatiques nationaux comme des systèmes d’assurance maladie, alors même que leurs origines bismarckiennes et beveridgiennes se sont estompées quand elles n’ont pas complètement disparu. Coexistent également dans l’Union des dispositifs très centralisés et des systèmes déconcentrés ou décentralisés. Certains pays privilégient un monopole d’organisation quand d’autres encouragent la concurrence entre les prestataires de soins ou leurs financeurs. Enfin, les tentatives de rapprochement, et a fortiori de convergence, restent limitées eu égard aux enjeux économiques et sociaux mais également culturels, que tout bouleversement d’un système de santé national comporte.
4On peut noter les avancées de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne et leur intégration dans le droit positif avec la directive sur les soins transfrontaliers de 2011.
5De même, l’Europe a été marquée par la construction de véritables réseaux d’agences ou d’administrations nationales de santé publique gravitant autour d’agences ou d’autorités européennes. Le dernier exemple en date est bien évidemment le projet d’Autorité européenne de préparation et de réaction en cas d’urgence sanitaire (HERA, pour Health Emergency Preparedness and Response Authority) retenu par la Commission européenne le 16 septembre 2021, au cours de l’épidémie de Covid-19, pour améliorer la riposte commune à de tels événements.
6C’est dans ce contexte que ce numéro des Tribunes de la santé propose de revenir sur certaines problématiques sanitaires communes aux pays européens mais également de s’interroger sur l’évolution de plusieurs systèmes nationaux. Avec l’espoir d’y trouver des éléments de réponse pour les nécessaires adaptations de notre système de santé aux défis majeurs qui l’attendent. |