Note de contenu : | Le droit au logement est un droit fondamental pour tout être humain. La Déclaration universelle des droits de l’homme ratifiée au sortir de la Seconde guerre mondiale l’a même inscrit dans son article 25, qui reconnaît à chacun le « droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l’alimentation, l’habillement, le logement, les soins médicaux, ainsi que pour les services sociaux nécessaires ».
Le lien intrinsèque entre la question du logement et le travail social a ainsi été posé universellement, et nous légitime comme les acteurs de plein droit de nos accompagnements à destination des publics les plus vulnérables.
Le droit au logement est devenu en France sous la Ve République une question politique et sociale cruciale. Il a d’abord fait l’objet d’inscriptions légales dans plusieurs textes fondateurs (notamment la loi Quilliot en juin 1982, qui rappelle que « le droit à l’habitat est un droit fondamental »), jusqu’à être le principal objet de la loi du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement, dite loi Besson. Enfin, la loi n° 2007‑290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale crée la possibilité d’engager la responsabilité de l’État face aux difficultés rencontrées pour se loger ou se mettre à l’abri.
Se loger ou être logé pourrait donc apparaître à chacun de nous comme une évidence. Cependant, inscrire le droit au logement dans le texte de la Constitution française ou dans la Déclaration universelle des droits de l’homme n’a pas suffi à résoudre l’équation insoluble du besoin exponentiel de logements – entendre des lieux d’habitation salubres et décents, en nombre nettement supérieur à l’offre de logements prévus dans les programmes de construction ou de réhabilitation de l’État.
Parfois, pour nos publics les plus vulnérables, la difficulté ne réside même pas dans l’insuffisante disponibilité de logements sur le territoire : elle correspond à un impensé ou à un impossible à atteindre. Rupture après rupture, lorsque le lieu de vie vient à manquer à son tour, lorsqu’il est en passe d’être perdu, ou qu’il ne représente pas ou plus un espace de sécurité personnelle, ce logement insatisfaisant ou son absence occupe une place centrale dans le psychisme de l’individu, et vient souvent écraser de tout son poids les autres besoins fondamentaux comme l’alimentation ou la vie affective.
Pourtant, chacun a sa manière de vivre son logement ou son hébergement, et développe une manière « d’habiter » qui lui est propre, qu’il a construite à travers son éducation, son histoire personnelle et son parcours de vie.
L’accompagnement social de la question de l’hébergement ou du logement est un symbole puissant de la relation d’aide qui fonde notre travail, mais il est malheureusement souvent associé pour nos publics à un risque d’immixtion ou de contrôle social de son espace de vie et de ses choix personnels. Là réside toute la complexité d’actionner et de mettre en œuvre des politiques sociales qui se trouvent alors à l’intersection de l’intime et de la sphère publique. De plus, mobilisant eux-mêmes les dispositifs et les possibilités offertes par les politiques publiques du logement et de l’hébergement, les assistants de service social ne peuvent pallier le manque d’offres ou la qualité médiocre, voire le caractère insalubre de certains habitats présentés sur le marche de la location, que celui-ci soit privé ou public.
Dans de nombreuses villes, les assistants de service social se trouvent de façon récurrente en face de personnes privées de logement ou d’hébergement sans qu’aucune solution à court et moyen terme ne semble disponible sur leur territoire.
Comment les travailleurs sociaux ajustent-ils alors leur accompagnement envers ce public en situation de vulnérabilité ? Quels sont les dispositifs légaux ou militants existant en France ou ailleurs ? Quelles stratégies les institutions ou les associations mettent-elles en œuvre pour proposer des réponses innovantes ?
Dans la première partie, nous verrons en quoi le mal-logement, loin de n’être qu’une réalité urbaine, peut recouvrir des situations diverses et complexes sur l’ensemble du territoire national et européen. Dans la deuxième partie, nous explorerons différentes modalités d’accompagnement liées au logement, notamment celles proposées par le Housing First. Enfin, la troisième partie nous permettra de mesurer le chemin à parcourir pour animer les politiques publiques au quotidien sur le terrain.
Au travers de ces lectures, nous espérons vous transmettre une curiosité et une ouverture sur le sujet multidimensionnel du logement, en vous proposant de découvrir les points de vue de professionnels d’horizons différents. |