Résumé : | L’objet de cet article est d’attirer l’attention sur le discours de patients souffrant de douleur chronique avec une composante sous-jacente psychologique et d’en tirer des pistes de réflexion. Le discours de ces patients dit une détresse et un sentiment d’abandon profond. Le discours concerne principalement la médecine dans une recherche presque exclusive de solutions médicales. Il se répète et se situe dans le registre sensoriel de la vision « voir », « montrer » ». Par ailleurs, il interroge le lien dans la relation soignante car il met l’interlocuteur, en particulier le médecin, dans une position paradoxale : être le seul qui pourrait sauver et qui, en même temps, va décevoir. De plus, le discours est habité par la peur de ne pas être cru parce que la douleur ne se voit pas. La répétition du discours et la mise en échec des propositions pour diminuer la douleur suggèrent qu’une partie des causes n’est peut-être pas prise en considération comme des traumatismes anciens. Le traumatisme est difficile à mettre en mots. Les symptômes seraient comme une tentative–qui se retourne cependant contre le patient–de le dire. La difficulté de traiter les symptômes par une médecine trop technique située dans le registre de ce qui se voit et se mesure, rappelle l’importance de traiter les traumatismes qui nécessitent un engagement psychique dans le soin et la relation humaine. Le discours et les symptômes qui se répètent sans pouvoir trouver d’issue questionnent un discours social qui fait croire que l’on peut maitriser la vie. Finalement, c’est l’impossibilité d’entendre le tragique trop angoissant de la condition humaine et la mort. |